Le feuilleton DSK continue, la guerre en Lybie et en Afghanistan aussi, les vacanciers qui se sont entassés sur les routes pour aller vers le soleil pataugent dans l’eau, l’été est pourri. Il tombe des cordes et les agriculteurs sont toujours mécontents, on n’achète pas leurs fruits aux prix convenables et il n’y a pas assez d’eau pour leurs céréales, seuls les congés payés apaisent le climat des usines mais les employés des transports publics et aériens menacent de faire grève. Nous sommes en France ; Justement, une chose, et une seule, apaise les esprits, c’est le Tour de France cycliste. Cette année, nous avons un champion comme on les aime, un second, un Poulidor, un vrai héros national, un héros par défaut, douze fois maillot jaune dans le tour et absent du podium à l’arrivée. En France on n’aime jamais tant que ceux qui perdent, les gagnants, les premiers, les providentiels nous exaspèrent. La preuve, le film « le Grand Charles » sur De Gaulle passé sur Arte le 28 Juillet a recueilli moins de 2% de téléspectateurs qui regardaient à ce moment-là, « Police scientifique et les experts » sur TF1. C’est dans l’ordre des choses, il n’y a qu’en Avignon que l’on pense que la démocratisation culturelle est en cours
Avignon justement qui clôt son bilan en demie teinte avec 123 000 spectateurs, la moitié du festival rock des « Vieilles charrues ». Pourtant c’est là que se sont bousculées les stars du PS en campagne pour leur investiture, là sous le mistral « in the Place to be ». Martine y a fait des promesses mirifiques, 50% d’augmentation du budget de la culture s’il elle était élue, un peu plus tard, elle corrigera, « sur la durée du quinquennat », ouf, François peut respirer, lui qui veut réduire la dette, quant à Arnault, il est pour un « prix unique » de la culture : « tous les spectacles à moins de dix euros », c’est pas démocratique ça ? C’est pas une politique ça ? On applaudit à gauche et dans les rangs des intéressés. Le ministre de la culture qui s’est fait huer dans la cour d’honneur du Palais des Papes, se venge d’un communiqué vengeur et explique qu’il a sanctuarisé le budget de la culture et qu’il l’a maintenu au niveau de l’inflation. Là ! À Paris, les polémiques s’apaisent à propos de l’hôtel de la marine, le sage Giscard a trouvé l’œuf de Christophe Colomb, un marin lui aussi, on le donnera…au Louvre. Paris étend ainsi son image de ville musée, c’est dans l’ordre des choses. Le Président ne prend pas de vacances, il courtise la chancelière allemande afin qu’elle accepte de donner ses sous à la Grèce qui va de plus en plus mal. Les Français ne s’en sont pas rendu compte, mais on a été à deux doigts d’une nouvelle crise de l’Euro, ce qu’ils voient, c’est qu’on leur parle effort, travail, dette, remboursement, rigueur, eux qui ne rêvent que de temps libre et de services publics gratuits. Heureusement qu’il y a les socialistes pour rêver un peu ! À Montpellier, des esprits fins se demandent où est passé le peuple, submergé par le populisme. En Avignon, le vieux Stéphane Hessel qui n’en revient pas de sa nouvelle jeunesse éditoriale appelle à l’indignation en compagnie du vieil Edgar Morin qui voudrait bien accrocher son wagon à un tel succès de librairie. Mais, lui, ses livres sont un peu plus difficiles à lire pour en faire des best-sellers, n’importe, un millier de personne boivent leurs paroles, ça les tiendra au moins jusqu’à la fin de l’été. Autre star médiatique, l’inévitable BHL pose dans le JDD en costume de soirée sombre, chemise impeccablement blanche et col relevé, lunettes de soleil à la main, mèche au vent et barbe de deux jours en plein désert Lybien. Il pose une main condescendante sur l’épaule d’un insurgé à Chech et Kalachnikov, l’air de dire : allez-y mon brave, faites-vous trouer la panse vous entrerez dans l’histoire. (JDD 24 Juillet). À Oslo, un tueur au physique énigmatique d’acteur de cinéma fait exploser une bombe en pleine ville et abat au fusil près de soixante-dix adolescents pour sauver la civilisation occidentale devant la menace islamique après avoir posté 1.500 pages délirantes sur Internet. Que n’a-t-il trouvé un éditeur pour en faire un polar, on aurait économisé un massacre ! Les livres en effet et aussi les spectacles sont pleins de ces délires meurtriers qui sont la réponse imaginaire aux pulsions de mort. Les guerres et les attentats hélas en sont la triste illustration. Dans les arènes de la planète tauromachique, on annonce le retour de l’icône José Tomas, le Torrero qui donne le frisson de la mort aux foules venues assister à la mort des Toros. La corrida émeut les amis des bêtes pour lesquels une bête n’est jamais un fauve mais simplement quelque chose qu’on voit au zoo avec les enfants et à qui l’on donne des cacahuètes. Et pourtant de la tragédie à l’arène, les hommes ont toujours eu besoin de l’exutoire symbolique destiné à canaliser, les grecs disaient purifier, leurs pulsions de mort. L’inventeur de la théorie, le grand S.Freud s’est rappelé à nous par le truchement du décès de son petit fils, Lucian, immense peintre dont les œuvres exposaient le corps humain avec autant de cruauté et de vérité que s’il avait dévoilé les méandres de nos âmes. En tout état de cause, on se dit : « heureusement qu’il y a l’art pour ne pas périr devant la réalité, et heureusement qu’il y a l’humour pour rire des palinodies de nos contemporains ».