PRIORITÉ JEUNESSE

Dans le contexte de morosité budgétaire où se débat le Ministère de la culture chacun scrute un peu les bonnes nouvelles éventuelles. La plupart du temps, elles se résument à des diminutions de moyens moins importantes que prévu, c’est dire.

Pourtant, c’est le moment de poser les bonnes questions. Si l’État et les collectivités, comme c’est probable, ne peuvent plus tout financer, il est peut-être temps de définir des priorités. Et s’agissant de la culture, si l’on considère que son contenu et son appropriation, voire sa pratique par les citoyens sont un facteur de vie et d’épanouissement personnel comme sociétal, par où commencer ? Etant entendu qu’on ne change pas le périmètre de l’action culturelle publique, est-ce que la priorité est celle de soutenir les établissements culturels qui accomplissent un service public de la culture ? Est-ce que le soutien à la création et aux artistes est plus important encore ? Est-ce que l’animation culturelle des villes, des campagnes, l’été, l’hiver, tout le temps, est décisive ? Est-ce que le soutien aux industries culturelles qui véhiculent la création française d’abord et mondiale ensuite doit être privilégiée ? Chacun de ces points et ils ne sont pas exclusifs d’autre chose mérite d’être examiné, mais il en est un qui me semble-t-il s’impose à tous les autres, c’est celui qui concerne la jeunesse, prise en son sens le plus large, de la petite enfance à l’adolescence. Car, lorsqu’on réfléchit à la manière dont s’acquiert le goût des citoyens pour la culture, entendons le goût pour les arts et les œuvres de l’intelligence et la formation de la sensibilité, il faut bien reconnaître que c’est à l’école, grâce à un maître ou une maîtresse éveilleur(s), au collège, au lycée grâce à un professeur inspiré, que cela se produit le plus souvent. Vous me direz que c’est aussi en famille. Heureusement, mais ce n’est pas le cas pour tous, car il n’échappera à personne qu’éduquer, c’est d’abord assurer à l’enfant des parents déjà éduqués et en matière de culture, c’est la même chose, il faut des parents cultivés. Or ces conditions, on le sait, ne sont pas remplies partout, c’est pourquoi, l’école reste malgré tout le lieu idéal de ce premier et essentiel contact avec la culture. C’est donc là que doit porter l’effort. Or, les récentes réformes, qui laissent un peu plus de temps libre à l’enfant, « la priorité jeunesse » à laquelle travaille le Ministère de la culture semblent indiquer que l’on a pris en compte cette nouvelle priorité. Là encore, des années d’expérimentation menées en milieu scolaire dans notre pays depuis plus de trente ans ont indiqué clairement ce qu’il convenait de faire : apprentissage et pratique des arts, connaissance artistique, ouverture et diversité. Le vrai problème n’est donc pas tant de concevoir des contenus que de pouvoir les offrir à tous. Car c’est là que le bât blesse. L’expérimentation ici ou là des « classes culturelles », des options ou des ateliers artistiques, ont partout donné de bons résultats mais à un certain coût. L’extension de ces procédures à des millions d’élèves demande un choix budgétaire capital. Et dans le contexte général, il ne pourrait se faire qu’au détriment d’autre chose. Nous avons la faiblesse de penser cependant que c’est par là qu’il faudrait commencer. Oh, ce discours a souvent, souvent été prononcé et entendu et bien des ministres se sont cassé les dents sur cet objet. Mais c’est peut-être au moment où il faut opérer des choix radicaux qu’il convient de le tenir à nouveau et encore. On en sent comme la tentation,.. reste la volonté.

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