[((/public/cesar/.moteur_d_avion_t.jpg|moteur_d_avion.jpg|R|moteur_d_avion.jpg, juin 2017))|/public/cesar/moteur_d_avion.jpg||moteur_d_avion.jpg][((/public/cesar/.code_d_Hammourabi_t.jpg|code_d_Hammourabi.jpg|L|code_d_Hammourabi.jpg, juin 2017))|/public/cesar/code_d_Hammourabi.jpg||code_d_Hammourabi.jpg]C’est peut-être un peu prétentieux de se mettre dans le rôle, mais si d’aventure j’avais à décerner le lion d’or de cette Biennale, mon choix serait vite fait car l’événement de cette Biennale pour moi est dans la découverte du magnifique et inattendu pavillon libanais exilé de l’autre côté du canal de l’Arsenal (on doit s’y rendre en bateau, ce qui fait qu’une infime partie des visiteurs le découvrent) où un artiste plasticien et musicien : Zad Moultaka propose avec « Soleil noir » une œuvre qui aurait mérité haut la main et très au-dessus du lot, le Lion d’or cette année.
Qu’on en juge : la question posée est celle-ci : quel est ce Dieu sauvage qui depuis la nuit des temps ravage les villes et jette les hommes dans l’exil, « le seul qui gouverne sans partage depuis la nuit des temps ? » Quel est ce soleil noir qui frappe depuis le ciel sans pitié les mortels que nous sommes ? Hier il était invisible, aujourd’hui, il a une forme, celle des avions qui tuent dans le vrombissement des moteurs. Il n’est pas indifférent de noter que l’artiste franco-libanais Zad Moutalka est aussi un musicien, chercheur à l’Ircam, qu’il a travaillé aussi bien sur les voix humaines, par exemple ces voix Thibétaines du chant diphonique que sur le bruit des moteurs de voitures de courses dont il a tiré les éléments d’une microphonie qui fait aussi penser à la musique de Ligeti. Qui est donc cet artiste qu’on pourrait aussi bien comparer à Xénakis (au Xenakis des « Nuits »), qui est-il pour aller chercher dans le vrombissement d’un moteur d’avion de chasse Rolls-Royce Mk209 ce bourdonnement d’abeille de fer qui annonce la mort et en faire de la musique ? Comment trouve-t-il le moyen de mélanger la psalmodie de la lamentation sur la destruction de la ville d’Ur et créer une analogie entre ce monolithe de fer et celui de basalte où est écrit le code d’Hammourabi depuis 4 000 ans , la première des tables de la loi de l’humanité au temps de Babylone. C’est ainsi que dans la pénombre d’un hangar de chantier de l’Arsenal retentissent les hautparleurs qui psalmodient l’hymne de Samas (le soleil noir) cependant qu’un faisceau de lumière éclaire les murs qui se mettent à scintiller comme ceux de la basilique San Marco de toutes leurs tesselles d’or. Mais erreur, ces sont 150 000 pièces de monnaie qui font vibrer la lumière sur le mur, le veau d’or est ici et pas seulement dans la bible. Aura-t-on simplement une idée de ce qu’est cette œuvre dont l’apparence est plastique mais dont le cœur est musique dans une synthèse inouïe de culture, d’humanité et de talent. Quand on pense que la France a choisi un artiste qui a fait transformer son pavillon en studio de musique qu’on traverse distraitement, la proposition de Zad Moultaka qui aurait eu mieux sa place là, atteste qu’il n’y manquait que d’en jouer la partition pour faire sens. Là-bas était le lieu, ici est l’œuvre. De cet artiste hors normes, on devrait entendre reparler.